INTERVIEW

Véronique Genest en interview

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Vingt-deux ans passés en compagnie du commissaire Lescaut auraient presque pu nous faire oublier qu’il ne s’agissait là que d’un personnage campé par une comédienne qui, aurait pu, quant à elle, se perdre au fil des années… Mais Véronique Genest, d’un naturel curieux et travailleur, n’a heureusement jamais cessé de multiplier les projets d’écriture, de tournage et de théâtre. À l’affiche en cette rentrée d’une pièce du britannique Peter Quilter – Face à face -, c’est en compagnie de Martin Lamotte qu’elle va – tout comme lui – assurer pas moins de cinq rôles différents par soir à coups de perruques, de bijoux ou de robe de mariée ! Spontanée, naturelle et totalement au service des personnages à incarner, Véronique Genest fait partie de ces rares femmes qui parlent et agissent sans se préoccuper de l’image qu’elles renvoient. Évoquant sans langue de bois son régime dans l’optique d’apporter un peu d’aide et d’espoir à des gens qui ne voyaient jusque là plus d’issue à un problème quel qu’il soit, la pétillante rousse peut se targuer d’être une artiste populaire au sens le plus noble du terme…

 

Véronique Genest dans « Face à face » à Sanary sur Mer le 06 octobre • à Marseille le 07 octobre • à Salon de Pce le 21 octobre

 


« Je ne m’engueule bien qu’avec les gens que j’aime ! »


 

Morgane Las Dit Peisson : La pièce Face à face débute dans quelques jours*…

Véronique Genest : Et comme c’est le cas pour chaque pièce, on ne se sent pas prêts du tout mais on espère bien que le jour « J » la magie va opérer une fois de plus ! (rires) Pour l’instant on travaille sans cesse, de 9h à 20h au théâtre ou chez nous, on peaufine nos intentions, on ajuste nos déplacements… Je suis bosseuse alors ça me plaît énormément !

Préparer un rôle exige beaucoup de travail mais là, il y en a cinq…

C’est compliqué à exprimer mais je ne saurais pas dire si se fondre dans la peau de cinq personnages différents recquiert cinq fois plus de travail… Les histoires de chacun d’entre eux m’aident beaucoup à les façonner assez naturellement car, selon les situations dans lesquels ils se trouvent, ça va conduire à tel ou tel comportement, à telle ou telle gestuelle et donc à adopter tel ou tel type de langage… Il y a quelque chose de très instinctif dans tout ça et d’ailleurs, c’est ce qui m’amuse dans la création d’un rôle. Je sais rarement avant de le modeler à quoi il va ressembler, il naît vraiment, comme un enfant, à la fin d’une espèce de gestation. Et puis, tout particulièrement dans Face à face, je suis très aidée par les nombreux accessoires, les vêtements et les perruques que j’endosse tout au long de la pièce ! (rires)

Cinq femmes à la fois…

Changer de peau constamment est le rêve de tout comédien alors pour le coup, avec Martin Lamotte, dans cette pièce, on est servis ! (rires) J’incarne l’assistante personnelle d’un mec très riche que j’ai imaginée en ex-mannequin ; je me glisse sous les traits d’une actrice qui, bien qu’on mette toujours un peu de soi, n’est pas tout à fait moi ; j’enchaîne sur une divorcée complètement bourrée – et c’est d’ailleurs bien plus compliqué à jouer qu’on ne le croit ! (rires) – avant de camper une nana un peu capricieuse qui doute à l’idée de s’engager pour la troisième fois ! Ce qui est amusant, en dehors de la performance d’acteur, c’est réellement de varier les jeux, les styles, les registres car, bien que ce soit une pièce comique, le rire est tantôt franc, tantôt tendre, tantôt grinçant…

La scène n’est pas un lieu où l’on s’économise…

J’aime ça, j’adore ça ! On ne sait jamais ce qu’il va se passer, on remet tout en jeu chaque soir car, que l’on joue une pièce pour la première ou la 200ème fois, on a toujours la sensation de ne pas être au point et c’est ça qui nous pousse inlassablement à tout faire pour combler ce que l’on croit être une faille. Le théâtre nous incite à tenter de faire toujours mieux… Mais, lorsque l’on atteint un moment d’osmose lors d’une représentation, on le recherche le soir suivant mais il ne se reproduit pas alors on recommence encore et encore… Même si la représentation parfaite n’existe pas, ce qui s’en approche le plus, à mes yeux, c’est d’entendre le rire du public ou de capter son émotion car si je suis sur les planches, c’est avant tout pour ça !   

Ce contact a dû vous manquer pendant 22 ans de Julie Lescaut ?

Même si l’emploi du temps était très chargé pendant toutes ces années, j’ai heureusement réussi à monter sur scène pour ressentir l’énergie des gens car en effet, cette immédiateté, cette chaleur et ce répondant finissent par manquer quand on ne joue qu’en présence de caméras… Même si c’est, selon moi, plus exténuant de tourner, ça reste une activité que j’adore car, au delà de mon travail de comédienne, je peux, entre deux prises, observer celui de tous ces savoir-faire qui s’affairent autour d’un projet commun et ça c’est formidable !

Vous avez d’ailleurs écrit sur les dessous de la série, 22 v’là julie !

Cette série a occupé une grande partie de ma vie et elle m’a énormément appris sur moi, sur le jeu et sur le métier en général… Ça m’a rendue plus « flexible » et réactive car quand on débarque sur un tournage, on ne connaît parfois ni les lieux ni nos partenaires et puis, ça m’a formée aux éclairages, à la postprod’, aux scénarios…

Vous retrouvez Nicolas Le Guen sur cette pièce…

Il jouait mon fils dans Portrait craché et là, il signe l’adaptation française de Duets… J’aime rencontrer de nouvelles personnes mais j’apprécie énormément de me retrouver « en famille » car ça me rend, je crois, plus efficace… Ça permet d’anticiper, de se comprendre plus rapidement mais aussi se dire les choses sans mettre de gants ! (rires) Avec Martin, on connait bien nos caractères respectifs alors on sait que quand on se « frite » pour un détail, ça ne porte pas à conséquence ! C’est très sain de ne pas être trop béni-oui-oui et puis, de toute façon, je ne m’engueule bien qu’avec les gens que j’aime ! (rires)

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson avant la première • Photos L. Baron


Interview parue dans les éditions n°396 #1, #2 et #3 du mois d’octobre 2018

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