CONCERT

Sebastian Knauer en interview pour son concert au Domaine des Féraud

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« À 4 ans, je savais que j’en ferais mon métier ! » Sebastian Knauer

 

Passionné par le piano depuis son plus jeune âge, Sebastian Knauer aura poursuivi son rêve jusqu’à continuer, plus de 40 ans après l’avoir décidé, à exercer ce métier aussi particulier qu’exigeant qui l’aura conduit à parcourir le monde entier ! Sur la volonté de Markus Conrad, musicien et propriétaire du Domaine des Féraud, le pianiste allemand se produira sous le ciel étoilé de Vidauban, en plein cœur des vignes, le 13 juillet prochain pour partager avec le public une programmation classique aussi savoureuse que populaire… 

 

 


 

 

Sebastian Knauer pour son concert au Domaine des Féraud

concert / récital / classique

 

 

Morgane Las Dit Peisson : Vous parlez extrêmement bien français !

Sebastian Knauer : J’ai appris le français quand j’avais cinq ans parce que mes parents avaient un appartement de vacances à La Grande-Motte, en Languedoc. J’ai eu la chance d’y passer tous mes étés quand j’étais jeune. Et puis, ma mère parle très bien français car elle a fait ses études à Genève et moi, étudiant, je suis allé à Paris chez Monsieur Philippe Entremont qui est un grand professeur !

Un attachement particulier à notre pays…

En effet ! (rires) Je ne parle pas les langues de tous les pays que je traverse ! J’ai essayé le chinois mais c’est trop difficile ! (rires) Mais remarquez que l’allemand, même pour les Allemands, est également loin d’être simple ! (rires) On a le masculin, le féminin, le neutre et comme dans beaucoup d’autres pays dans le monde, on est en train de s’interroger sur le non-genré… Ça risque de compliquer encore un peu plus la donne bien qu’on ait, je pense, beaucoup d’autres problèmes plus urgents à régler dans nos pays en ce moment…

On parle par exemple d’arrêter les énergies nucléaires, on ferme des usines alors on se retrouve, en Allemagne, à les acheter à d’autres pays…

C’est pour ça que c’est important d’offrir une ou deux heures d’évasion et de lâcher-prise au public à travers la musique ?

C’est toujours difficile de s’en rendre compte quand on joue mais après les concerts, je peux échanger avec le public et c’est en effet quelque chose qui revient souvent. Les gens me disent que la musique leur permet d’oublier les choses désagréables et qu’elle leur fait du bien. De toute façon, c’est toujours salutaire de mettre son téléphone ou son cerveau sur off pendant un petit moment, que ce soit pour écouter du piano ou regarder un bon film !

 

 

Ça rappelle, quand on doute, à quel point ce qu’on fait n’est pas totalement futile…

Exactement ! (rires) D’ailleurs, c’est une question qui s’est évidemment imposée à moi pendant le Covid… J’avais une grande tournée au Japon et en Chine qui a rapidement été annulée, suivie de celle aux États-Unis et celle prévue en Europe… J’ai ainsi perdu plus de 100 concerts ! Comme tout le monde, je m’étais déjà dit qu’on jour je pouvais être physiquement empêché de jouer à cause d’un accident ou d’une maladie mais, me retrouver littéralement arrêté sans pouvoir gagner ma vie, je n’y aurais jamais cru ! Ça m’a fait me poser plein de questions sur l’utilité de mon métier mais la passion a été la plus forte et j’ai continué à travailler même si je ne pouvais plus me produire devant du public… Et puis, ce qui m’a rassuré, ça a été de parler avec les gens et de découvrir qu’à eux aussi, le théâtre, l’opéra, les spectacles et les concerts manquaient.

Aujourd’hui, après Covid, on s’aperçoit que la vie est différente, que le public n’est pas toujours au rendez-vous car il s’est habitué à rester chez lui et que la vie courante est devenue extrêmement chère depuis ! C’est parfois compliqué de pouvoir s’offrir des places de spectacles… L’argent, quoi qu’on en dise, reste le nerf de la guerre !

Vous allez venir jouer le 13 juillet 2023 au Domaine des Féraud

Ce sera une première sur place ! En revanche, je connaissais déjà le nom du domaine parce que mes parents, quand on venait en France, buvaient de ce rosé ! J’ai trouvé ça amusant de venir y jouer ! Et surtout, je connais Markus Conrad (le propriétaire) qui est lui aussi musicien et originaire d’Hambourg. Il avait l’idée d’un jour me faire venir jouer dans son domaine. J’ai tout de suite accepté car j’adore le sud de la France en général et La Provence en particulier ! Jouer dans un cadre aussi magnifique que ce domaine et en plein air, ça va être une très belle soirée !

 

 

Un lieu inspirant…

Oui, ça m’a donné envie de jouer du Mozart, du Beethoven mais aussi un morceau – Rhapsody in Blue – du compositeur américain George Gershwin à qui l’on doit, entre autres, Summertime

Comment, quand on connaît des centaines de morceaux, on arrive à faire une sélection ? C’est l’endroit qui vous inspire ?

C’est exactement ça, je ne joue jamais la même chose. Pour la date au Domaine des Féraud, j’ai discuté avec Mr Conrad qui m’a demandé de me tourner vers des morceaux et des compositeurs populaires et classiques comme Schubert ou Mozart. Ça m’allait parfaitement puisque c’est une grande partie de mon répertoire. Je vais par exemple jouer une sonate très connue de Beethoven qui s’intitule Clair de lune… Il y aura peut-être du Ravel ou du Debussy, mais jusqu’à ce que j’arrive à Vidauban, tout peut encore changer ! (rires)

 

Le Domaine des Féraud accueille le « Festival Gloriana » et le pianiste Sebastian Knauer

 

À 4 ou 5 ans, comment se retrouve-t-on devant un piano ?

Quand j’ai eu 4 ans, j’ai dit « Je veux devenir pianiste » ! On avait un piano à la maison parce que ma mère en jouait pour son plaisir… C’est sûrement ce qui m’a donné envie ? Je ne sais pas mais ce qui est certain, c’est que je savais que j’en ferais mon métier ! Et je suis toujours là ! (rires)

Des heures de travail, de sacrifices et d’apprentissage…

Oui, c’est une grande décision quand on est jeune alors parfois je n’avais pas très envie de travailler ! Par exemple, pendant mes séjours en France… Mes parents louaient un piano pour les vacances mais moi j’avais surtout envie d’aller jouer sur la plage ! Ils ne m’ont jamais obligé mais m’ont bien expliqué que si je voulais vraiment en faire mon métier, il allait falloir que je travaille dur… J’ai donc dû apprendre à me motiver moi-même. J’ai le souvenir d’une compétition nationale en Allemagne pour laquelle je ne m’étais pas assez préparé. Je devais avoir 14 ou 15 ans et même si je n’étais pas arrivé dernier, j’étais loin de mon objectif ! J’ai alors commencé à travailler beaucoup plus fort car j’étais motivé à gagner les prochaines fois et j’ai ensuite remporté tous les premiers prix.

Au-delà de la compétition, c’est essentiel, pour le restant de sa vie, de savoir travailler seul et se concentrer sur ses propres objectifs sans avoir besoin que quelqu’un vous pousse…

 

 

Le classique est un des seuls registres musicaux dans lequel il y a une telle compétition…

C’est assez spécial et pour être honnête, je déteste ça ! (rires) Être sur scène devant un jury de 8 ou 10 grands professeurs venus du monde entier pour décider si oui ou non vous êtes un bon pianiste, c’est très déstabilisant… Mais c’est utile pour se faire connaître et faire des rencontres. En revanche, le plus important dans une carrière ce ne sont pas les prix mais ce sont les billets que l’on vend car ils signifient qu’on a conquis le cœur du public. C’est lui qui décide vraiment si je suis bon ou mauvais et si je mérite qu’il fasse le déplacement !

Pendant un concert comme au Domaine des Féraud, une partie du public viendra pour vous, une autre pour la musique et une autre encore pour le cadre… Convaincre le public, le séduire, c’est ce qui donne à chaque fois envie de retourner sur scène ?

Absolument ! Ça m’intéresse beaucoup quand je sais, par exemple, qu’un public ne me connaît pas ! Je veux tout donner pour le convaincre et ça, c’est une motivation énorme ! J’aime sentir que j’ai « gagné » le public, qu’il est heureux et prêt à revenir une prochaine fois. S’il ne regrette pas de s’être déplacé, c’est le plus beau des succès !

Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson pour Le Mensuel / Photos DR / Juillet 2023

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