INTERVIEW

Olivia Ruiz en interview

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Consciente que dans toute relation surprendre l’autre est essentiel, l’artiste dont le cerveau semble constamment en pleine ébullition ne s’est jamais, depuis la quinzaine d’années qu’on la connaît, reposée sur ses acquis ! Mettant un point d’honneur à créer des récits aux univers riches et marqués, Olivia Ruiz, au fil de ses albums, a pris le parti de composer et d’écrire de la même manière qu’elle interprète ses titres sur scène… Sans pédale de frein, à fond, sans filtre et sans tabou, ses histoires sont donc à son image, fougueuses, vivantes et surtout jamais mièvres… Inspirée par son nouveau rôle de maman et bien que son dernier album À nos corps-aimants regorge d’amour pour ce petit être qui a changé sa vie, la chanteuse rappelle qu’une mère, tout aussi impliquée qu’elle soit, est avant tout une femme pleine d’envies, de désirs et de rêves…

 

« À NOS CORPS-AIMANTS »

À Vence au festival Les Nuits du Sud le 06 juillet 2017

À Fréjus au Théâtre intercommunal Le Forum le 07 décembre 2017

 


« Je suis une grande curieuse et ce qui m’intéresse le plus est l’être humain… »


 

Morgane Las Dit Peisson : On vous verra à Vence en extérieur et à Fréjus, en salle fermée…  

Olivia Ruiz : Je trouve ça vraiment intéressant de passer d’une configuration à l’autre car ce n’est pas du tout la même écoute ni la même concentration. C’est une approche complètement différente et d’ailleurs je change la setlist si c’est en plein air pour que ce soit plus festif.

Sur scène, vous êtes habitée, fougueuse…

C’est effectivement à peu près ça ! (rires) Je gamberge malheureusement toujours un peu trop au quotidien alors c’est vrai que c’est un réel privilège que de pouvoir vivre des moments pareils où l’on est tellement centré sur l’autre et sur la notion de plaisir et de communion, qu’on ne pense plus à rien et surtout plus à ses petits soucis nombrilistes ! (rires) 

Au point que vous ne calculiez rien sur scène et pour une femme, c’est plutôt rare…

Ça m’insupporte ce côté très maniéré que peuvent parfois avoir certaines femmes mais aussi certains hommes… J’aime les gens un peu « bruts » alors ça me rebute quand des artistes sont trop dans la démonstration, l’exposition et la retenue… Évidemment, je ne peux pas dire que je ne m’apprête pas avant de monter sur scène, j’essaye toujours d’être la plus jolie possible mais ma préoccupation première est ailleurs. Je serais incapable, en me donnant au public pendant un concert, de réfléchir à comment me tenir pour qu’on n’aperçoive pas un double menton ou un maquillage dégoulinant ! (rires) 

Comme en amour, il faut être, sur scène, capable d’abandon…

Je suis tout à fait d’accord avec cette notion d’abandon et cette comparaison au rapport amoureux car je pense que pour la majeure partie des artistes c’est la même chose, on est en quête d’une forme d’amour… Sur scène, on essaye de donner le meilleur de soi en laissant parler son corps et c’est quand il est libre qu’il est le plus sensuel et le plus sexy. C’est un mélange très étroit qui s’opère pour être complètement en accord avec soi et avec l’autre. Le concert fonctionne véritablement quand l’artiste s’abandonne…

Dans votre album À nos corps-aimants, vous aimez toujours autant raconter des histoires…

À nos corps-aimants est vraiment la somme des histoires amoureuses et des douleurs que j’ai pu entendre autour de moi… Je suis une grande curieuse et ce qui m’intéresse le plus est l’être humain… C’est peut-être pour ça d’ailleurs que les gens me parlent aussi facilement, je suis un aimant à confidences ! (rires) Et, en entendant tous ces témoignages, je me suis dit qu’ils pourraient sûrement aider d’autres personnes dans le même cas.

Vous consacrez aussi des titres à votre fils, ça a été compliqué avec votre tempérament plutôt discret ?

C’est finalement moins compliqué que je ne l’aurais pensé car j’ai l’impression – en tout cas c’est ce dont j’essaye de me convaincre (rires) -, que personne ne connaît, dans mes chansons, la partie qui parle de moi, celle qui se réfère à mes proches ou celle qui n’est que le fruit de mon imagination. Je me répète ça en boucle pour pouvoir écrire le plus sereinement possible tout en restant dans le don de moi… Et, quand j’ai la sensation de me dévoiler un peu trop dans une chanson, je me convaincs d’aller au bout du truc et me disant qu’au pire, le public ne saura pas si c’est personnel ou imaginaire. Quand je suis sur des sujets un peu trop douloureux ou trop intimes, j’e m’en tire en mentant délibérément ! (rires)  

De toute façon, un chanteur est un conteur…

C’est exactement ça et au final, je ne crois pas que donner toutes les clefs de lecture soit quelque chose de si important… En quoi est-ce essentiel de savoir démêler le vrai du faux dans des histoires qu’on a imaginées pour faire évader les gens ?

Vous évoquez sans tabou mais sans vulgarité la sensualité et la sexualité…

Oui car ça m’a  toujours beaucoup étonnée que parler de sexualité soit aussi dérangeant alors que c’est peut-être la chose la plus naturelle que l’être humain ait conservée ! (rires) On m’a toujours dit que je posais trop de questions cash et j’ai remarqué que ça déstabilisait certaines personnes de mon entourage. Pour moi, ces tabous sont d’un autre temps !

C’est aussi un album qui confirme que féminité et maternité ne sont pas incompatibles…

Exactement ! La femme n’a pas à choisir entre être une mère et être une femme, elle est au quotidien la somme de tous ces différents rôles qu’on lui prête. C’est comme les clichés sur la migraine, ça m’énerve ! (rires)

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson • Photo Christophe Acker

Interview parue dans Le Mensuel de l’été 2017 n°383 éditions #1 et #2

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