« H » de Bernard Minier paru chez XO Éditions

H de Bernard Minier

roman / polar / thriller

• paru le 27 mars 2025 chez XO Éditions / 550 pages / 22.90€

Les fantômes du passé

Avec Un œil dans la nuit et Glacé, Bernard Minier avait déjà frappé fort… Il est revenu en mars dernier avec une nouvelle enquête du commandant Martin Servaz, pour un thriller dense, noir et magistralement construit, comme lui seul sait les tisser. Et si vous tenez à vos nuits, un conseil (que vous n’écouterez sans doute pas) : n’entamez pas ce roman car une fois lancé, vous n’en ressortirez pas avant de l’avoir achevé…

L’intrigue s’ouvre à Toulouse, où Servaz – habitué à travailler seul bien qu’à la tête d’une équipe aussi affûtée qu’un scalpel – est mis en disponibilité… Motif : Julian Hirtmann, le serial killer qu’il avait fait incarcérer en Autriche pour avoir violé et tué des dizaines de jeunes femmes entre 1990 et 2009, s’est évadé et aurait été vu sur le sol français. Ce dernier revendiquant la paternité de Gustav – l’enfant élevé par l’enquêteur – les autorités craignent pour leur sécurité.

Rapidement, les attaques contre des femmes reprennent et Servaz ne peut s’empêcher de poursuivre – discrètement – ses investigations. Vont se greffer un journaliste local, deux mystérieux informateurs, des dossiers explosifs, un écrivain qui rêve de réécrire un best-seller en retraçant le parcours du tueur, un club de détectives amateurs en ligne, un animateur star d’un talk-show corrosif, une famille influente rongée par une succession de drames…

Comme à son habitude, Minier joue à fond la carte du doute : qui manipule qui ? Hirtmann est-il réellement le monstre qu’on croit, ou le maillon d’un engrenage bien plus vaste ?

Au-delà de l’intrigue qui tient en haleine le lecteur, l’auteur brosse un portrait grinçant de notre société actuelle : hystérie des médias, prédominance du numérique, emprise des élites, peur de l’avenir, effondrement du lien intergénérationnel. Il fustige aussi cette l’information spectacle, où le sang et le sensationnel remplacent le journalisme, au bénéfice de l’audience…

Alors non, ce n’est pas « juste un polar » de plus. H est un miroir, fissuré, cruel, lucide et diablement efficace…

© Textes Jean-Louis Las Dit Peisson pour Le Mensuel / Photo DR

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