COUPS DE COEUR

« En ce temps-là, l’amour… » : David Brécourt livre un seul en scène poignant entre tragique et sublime

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En ce temps-là, l’amour… avec David Brécourt 

théâtre / drame / seul en scène

 

 

En ce temps-là, l’amour… : Construire le futur quand le présent s’arrête

Âmes sensibles ne pas s’abstenir : courrez le 14 mars au Théâtre Galli de Sanary-sur-Mer pour découvrir la pièce En ce temps-là, l’amour… avec David Brécourt. Le comédien y interprète un seul en scène saisissant, dans lequel il incarne un homme qui, dans les wagons de la mort qui l’emportaient vers Auschwitz, a été témoin d’une incroyable scène : un père qui, pendant l’inéluctable voyage, s’est donné pour mission de transmettre à son jeune fils « l’essentiel de ce qui aurait pu faire de lui un homme ». Faisant fi d’ignorer l’issue mortifère du périple, ce père se bat pour donner à son enfant les préceptes d’une vie… qu’il n’aura jamais. La pièce, élue « Meilleur spectacle » au festival Off d’Avignon 2021, se déploie sous la forme d’un conte moderne, narré en 7 chapitres qui suivent le rythme des 7 jours de voyage vers le point d’orgue tragique.

 

 

En 1997, le film La vie est belle de Roberto Benigni a ému le monde entier. Dans ce chef-d’œuvre de cinéma, un père déporté à Auschwitz avec sa famille recomposait la réalité, faisant du camp de déportation le décor d’un jeu pour cacher l’effroyable réalité à son enfant. Dans une pièce dont l’intrigue est proche de ce film poignant, David Brécourt livre un témoignage tout aussi déchirant, en enregistrant sur bande sonore le souvenir de ce père qui renversait la vapeur du désarroi afin de remplir une dernière fois et coûte que coûte, sa mission de parent. Au-delà des enseignements, le vieil homme se souvient de la volonté farouche de ce père à profiter de chaque instant auprès de son enfant, construisant le futur alors que le présent s’échappe. La vie aurait dû être longue et ces échanges auraient dû être distillés dans le temps, mais l’urgence bouleverse à jamais sa paternité.

 

 

Dans son premier seul en scène théâtral, adapté de l’ouvrage du même nom de Gilles Segal, David Brécourt diffuse beaucoup de sa propre personne dans le texte. Père et grand-père à la ville, le comédien emporte le public dans une interprétation emprunte d’une ferveur folle et d’une sincérité captivante. Les spectateurs se retrouvent balancés entre le prosaïque et l’inimaginable : les leçons de vie sont celles que tout un chacun pourrait transmettre à son enfant mais le contexte du train de la mort suspend ces dialogues dans une réalité impensable. Qu’aurait-on fait à la place de ce père ? Peut-être la même chose, car en ce temps-là, l’amour… c’était de mentir…

© Claire Thiebaut pour Le Mensuel / Photo DR / mars 2024 

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