
COUPS DE COEUR
Gwendoline Hamon en interview pour la série « Rien ne t’efface » sur TF1
« On souffre de ne pas être désiré…« Gwendoline Hamon
Si on pense souvent à elle pour son personnage dans la série Cassandre qu’elle accompagne depuis une décennie, l’actrice n’a rien perdu de sa passion du jeu et de la curiosité qui anime (normalement) les comédiens. Films, téléfilms, séries ou pièces ; comédie, policier, boulevard, drame, classique ou thriller, elle ne résiste à l’appel d’aucun projet qui la pousse en dehors de sa zone de confort. « Tout terrain », et alors qu’on la retrouvera bientôt au théâtre dans La jalousie de Guitry, c’est en ce moment même sur TF1 qu’elle nous donne rendez-vous. Dans la peau d’une mère courage obligée d’avancer malgré la perte de son fils, Gwendoline Hamon incarne avec intensité et justesse – dans cette adaptation de Rien ne t’efface de Michel Bussi – la complexité d’un tel drame : devoir réapprendre à vivre tout en faisant le deuil d’une partie de soi-même, et ne jamais pouvoir – ni vouloir – oublier… Dans ce thriller haletant et déroutant, on suit sa quête insensée de vérité…
Gwendoline Hamon en interview pour la série Rien ne t’efface & la pièce La jalousie
interview / séries / théâtre / tournée
- Rien ne t’efface : depuis le 25 août 2025 / chaque lundi / 21:10 / TF1 / saison 01 / 06 épisodes / à voir ici !
- La jalousie : 16 octobre 2025 > 18 janvier 2026 / Paris / Théâtre de la Michodière / infos & billetterie ici !
Morgane Las Dit Peisson : Participer à un festival comme Canneseries…
Gwendoline Hamon : Il y a un côté colonie de vacances parce qu’on retrouve l’équipe, les copains, les techniciens, le réal, on croise des gens et on a la chance, en venant à Cannes, d’avoir la mer, le beau temps et trois palmiers, donc on ne va pas bouder notre plaisir, c’est sympathique ! (rires)
Et puis, on est content de présenter notre travail, c’est le moment un peu ludique, on a l’occasion de rencontrer le public et on espère toujours, de tout cœur, que ce qu’on a préparé lui plaira…
La chronologie des productions est particulière car plusieurs mois séparent les tournages des diffusions et, quand le public découvre un projet, vous êtes déjà sur autre chose…
Oui, mais en même temps c’est chouette parce que contrairement au théâtre où l’on reçoit immédiatement le retour du public, les projets pour la télé ou le cinéma laissent une trace… Les images sont là et ça m’arrive souvent, quand je vois une scène, de me replonger dans l’atmosphère du tournage. Je me souviens que j’étais malade ce jour-là ou qu’il faisait un froid de gueux… (rires) C’est une autre façon de travailler que la scène, bien que ce soit le même métier. Effectivement, ce n’est pas un dialogue instantané avec le public, on n’est pas maître du montage, des images, des cadres, on est juste maître de son jeu, au service d’un texte et d’un metteur en scène. C’est pareil au théâtre mais c’est immédiat, éphémère et différent chaque soir. C’est une autre technique, moins minimaliste que devant la caméra car il faut savoir, tant dans la gestuelle que dans la voix, porter et pousser sans en avoir l’air… C’est très très différent mais j’aime foncièrement les deux.
On avait déjà parlé du travail sur Cassandre qui fait un peu partie de vous maintenant, mais comment s’empare-t-on d’un nouveau personnage comme celui de Maddi, dans la série Rien ne t’efface ?
Le travail s’est fait en amont. Il y a eu la lecture du scénario puis on s’est vu trois ou quatre fois avec Jérôme Cornuau (le réalisateur) pour parler longuement du personnage, de la vision qu’on en avait et de ce qu’on voulait, l’un et l’autre, transmettre au public, tout en restant fidèle au roman de Michel Bussi.
Une fois passé ce stade, le travail était pratiquement fait. En revanche, j’ai été très traqueuse lors du premier jour de tournage… C’était une scène à l’hôpital avec Samy Gharbi, mais quand j’ai aperçu dans le regard de Jérôme qu’il était content de ce que j’avais proposé, je me suis dit que j’avais bien compris mon personnage, puis tout est devenu évident.
C’est un rôle particulier… Dans le fond, c’est une mère qui perd son enfant et dans la forme, on est sur un thriller à la lisière de la science-fiction…
On est obligé de se demander si elle est folle, si elle délire, si elle est schizophrène, envoûtée… Et cette sensation est renforcée dès le 1er épisode où l’on subit une ellipse de 10 ans. C’est un rôle extrêmement dense et en permanence sur un fil, j’adore ça ! Je peux m’ennuyer rapidement donc j’ai besoin que ce soit compliqué et challengeant. Et en même temps, je ne vais pas jouer à l’actrice torturée ! (rires) Maddi est un personnage intense et meurtri mais à interpréter, ça a été un plaisir, en grande partie grâce à l’entente sur le plateau. Je l’ai rencontrée assez vite et je me suis mise dans ses chaussons…
À chaque scène, j’essayais de trouver la sincérité de la situation par rapport à son vécu et à sa détermination. Elle a été victime du pire drame qu’une mère puisse affronter, mais elle ne fait pas que subir, elle choisit de suivre une voie pour découvrir la vérité sur la mort de son fils.
Cette recherche va l’attirer et l’aimanter déraisonnablement…
Alors que c’est une fille rationnelle… Elle est médecin, elle est scientifique, donc elle voit bien qu’un truc ne va pas, mais son instinct de mère passe avant tout, bien qu’il ait été un enfant adopté. C’est un point important dans le roman car ça rappelle que la maternité ne passe pas forcément par le sang.
La perte de cet enfant l’a tellement fracassée que de le revoir dix ans après ne lui laisse pas le luxe de réfléchir. Elle ne se pose même pas la question tant ce qu’il se passe est violent. La souffrance laisse place à une joie irrationnelle et l’idée de le retrouver va devenir obsessionnelle. Il faut qu’elle parte à sa recherche et pour ça, elle va tromper et manipuler les autres, y compris ses proches, mais sans perversité. Elle est condamnée à mentir si elle ne veut pas être prise pour une cinglée… Et puis, bien qu’elle fonce tête baissée, elle doute…
On se demande toujours comment un parent peut se relever de la perte d’un enfant…
Malheureusement, je pense qu’on ne s’en relève pas… C’est une petite mort à l’intérieur, il y a quelque chose de brisé à jamais et en même temps, il y a une incroyable force qui pousse à continuer à vivre, malgré tout…
Il y a en elle une générosité, une compassion et une empathie alors que face à une telle injustice, on pourrait s’attendre à plus de haine et de colère…
C’est intéressant… Je ne sais plus si c’est moi qui ai mis de ma propre empathie ou si c’était très écrit… C’est presque un défaut chez moi. C’est tellement dans ma nature que ça me joue souvent des tours ! Ce qui est sûr, c’est que, si elle avait été moins empathique, elle aurait été moins fascinante à jouer certes, mais surtout à regarder. C’est une antihéroïne, alors il faut que les spectateurs l’aiment pour la suivre. Il faut qu’ils la comprennent et qu’ils acceptent son délire. Et en réfléchissant, je pense que c’était un de ses traits de caractère à l’origine, puisque l’auteur l’a imaginée médecin. Ça veut dire qu’elle a choisi un métier où l’on aide les autres, où l’on sauve des vies…
On va vous retrouver aussi dans Cassandre, entre autres…
On a tourné de nouveaux épisodes de Cassandre, un autre tournage est prévu en septembre mais je suis également en pleines répétitions d’une pièce que je vais débuter à La Michodière à Paris le 17 octobre ! Ce sera La jalousie de Sacha Guitry avec Michel Fau, qui en signe aussi la mise en scène, donc je suis évidemment très heureuse !
D’un rôle à l’autre, vous passez par tous les états…
C’est génial d’être comédienne pour ça mais ce qui l’est surtout, c’est de travailler, c’est d’avoir la chance qu’on vous propose des personnages et des projets. Je suis quelqu’un qui doute beaucoup de toute façon, mais c’est assez inhérent à cette profession… On ne sait pas pourquoi on n’est pas choisi, on souffre de ne pas être désiré, on a tellement le sentiment d’avoir des choses à apporter et à dire que ça fait mal quand les autres ne le voient pas… Ça ne tient à rien tout ça… Les choix sont subjectifs et c’est ça le plus compliqué lorsqu’on exerce un métier qu’on ne maîtrise pas… On est soumis à la vision et au désir de quelqu’un, c’est ce qui rend la chose à la fois si belle et si cruelle…
Il y a également le désir du public…
Je le remercie sincèrement d’être présent depuis tant d’années car sans public, il ne se passerait pas grand-chose. Je ne vais pas jouer pour moi-même dans ma salle de bain ! (rires) C’est une chance qu’il soit là, je lui en suis reconnaissante et surtout, je suis très conscience de mes « privilèges »… J’espère que ça va continuer longtemps, parce que j’ai l’impression d’avoir encore plein de trucs à dire et à vivre…
© Propos recueillis à Canneseries par Morgane Las Dit Peisson pour Le Mensuel / Photo Caroline Dubois TF1
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