INTERVIEW

Vincent Niclo – Tournée Luis – La Belle et la Bête

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VINCENT NICLO

Tournée « Luis »
« Je suis conscient du chemin parcouru mais aussi de celui qu’il reste à faire »

 

Aussi difficilement imaginable que cela puisse l’être, c’est bien en monstre repoussant que Vincent Niclo, ces derniers jours, a attiré le public en salle. Et même si le succès a été au rendez-vous lors de ces représentations exceptionnelles de La Belle et la Bête à Paris, le ténébreux ténor n’a pas abandonné son projet de tournée autour de son dernier album hommage à Luis Mariano. Car, ne reculant jamais devant aucun obstacle, c’est effectivement à l’opérette, cette fois-ci, qu’il a choisi de s’attaquer. Après avoir collaboré avec les Choeurs de l’Armée Rouge et alors même que sortira dans quelques mois à peine un prochain album composé uniquement d’inédits, Vincent Niclo a su conserver le courage et l’audace de ses débuts en n’osant suivre que ses envies quitte à surprendre à chaque fois un auditoire qui, indéniablement, a l’air d’apprécier ses prises de risque et sa richesse artistique…

vincent-niclo-interview-le-mensuel-2014-CMorgane L. : En ce moment, tu es la Bête dans la comédie musicale à succès La Belle et la Bête qui se joue à Mogador…

Vincent Niclo : Oui ! Alors c’est vrai que ça va plutôt pas mal en ce moment ! (rires) Je m’éclate réellement dans ce rôle qui reste tout de même très physique. Au-delà du maquillage que les spectateurs aperçoivent immédiatement, on me fait porter à chaque représentation une combinaison pour me grossir et me déformer… Ce qui donne un costume qui pèse assez lourd au final.

Un tel rôle a nécessité quel type de préparation ? Tu as dû avoir peu de temps pour reprendre ce rôle en guest ?

Oui j’ai eu peu de temps comparé aux autres membres de la troupe, mais peu importe les difficultés, je n’avais pas le choix ! (rires) Les producteurs sont venus me chercher et ils m’ont fait cette proposition… Au départ, pour être honnête, je n’étais pas très chaud à cause du fait que justement je n’avais pas beaucoup de temps pour me préparer mais ensuite, lorsque je suis allé voir le spectacle, je me suis dit que malgré toutes les difficultés que ça allait impliquer, je ne pouvais décemment pas passer à côté de ce projet… Il était trop beau ! Ce n’est pas parce que je joue dedans en ce moment que je dis ça mais c’est véritablement un spectacle merveilleux. Je n’ai eu que cinq semaines de préparation et je suis arrivé dans une troupe qui l’avait fait déjà plus de deux cents fois alors je me suis dit évidemment dit que c’était assez casse-gueule, mais au final, la première s’est très bien passée et depuis, je ne fais que progresser… Je me sens de mieux en mieux dans ce rôle !

Etre considéré comme un guest signifie que ta notoriété n’est plus à prouver… Qu’as-tu ressenti quand tu as reçu cette proposition ?

J’ai évidemment été extrêmement touché. Je ne vais pas te cacher la vérité, avant, comme beaucoup d’artistes, j’étais obligé de défoncer les portes, d’aller aux castings, de me débrouiller pour avoir des auditions… Alors que le directeur général vienne me proposer ce rôle, comme ça, sans que je n’aie rien faire, ça m’a prouvé que j’avais parcouru du chemin. Mais comme rien n’est jamais simple chez l’espèce humaine, ça m’a encore ajouté de la pression car je me suis dit que l’équipe attendait certainement beaucoup de moi alors j’ai réellement travaillé jour et nuit pour essayer d’être à la hauteur. Maintenant, je suis rassuré et heureux car les retours de la presse et du public sont bons.

C’est vrai que même si cette proposition est un immense cadeau, ça aurait pu devenir un cadeau empoisonné surtout lorsque l’on a une tournée à soi à assurer…

Exactement ! (rires) Parallèlement à La Belle et la Bête, j’ai ma propre tournée que j’essaye de faire de la meilleure façon possible et que je ne dois surtout pas délaisser par respect pour les spectateurs et pour mon plaisir aussi. On est en train de préparer des petits cadeaux, des surprises, des petits plus… C’est important que les gens ressortent de chaque salle sans regretter d’avoir payé leurs places. Pour moi c’est une question de grand respect envers le public, je n’ai pas envie de le décevoir alors peu importe la fatigue ou l’emploi du temps chargé en ce moment, je mets tout ce que j’ai comme ressources dans cette nouvelle tournée.

Quelle a été la plus grande difficulté pour toi lorsque tu as débuté les répétitions ?

Tout ! (rires) J’ai eu une grande difficulté à retenir tout le texte déjà. Mais c’est en même temps ce qui m’a plu dans La Belle et la Bête… C’est plus un travail de comédien qu’un simple travail de chanteur car en gros, dans le spectacle, j’ai un quart de chant et trois-quarts de comédie. Pour moi c’était un challenge, j’ai beaucoup travaillé avec le metteur en scène sur le placement de ma voix, l’élocution, les déplacements sur scène… Et puis il a fallu aussi que je me familiarise avec le maquillage et le très lourd costume sans lesquels le personnage ne pourrait pas prendre vie. Il a aussi fallu que j’arrive à intégrer une troupe qui se connaissait déjà très bien et qui oeuvrait dans un spectacle qui fonctionnait déjà très bien sans moi après sa deux centième… Ce n’était pas évident de me faire ma place au sein d’une équipe déjà aussi solide. Et puis, je me suis évidemment demandé pourquoi on avait fait appel à moi plutôt qu’à quelqu’un d’autre… Il me fallait donc être à la hauteur du rôle qu’on m’avait confié mais j’adore ce genre de challenges finalement !

Ce n’est pas ta première expérience en comédie musicale…

Je me suis toujours imaginé travailler dans l’esprit des écoles américaines en me disant que plus on avait de cordes à son arc dans ce métier, plus on avait de chances de travailler. Je me suis formé comme comédien, j’ai travaillé ma voix et j’ai fait un peu de danse aussi. C’est un parcours complet qui m’a vraiment enrichi et qui m’a appris à adorer ce genre de spectacles…J’ai vraiment essayé de me former au maximum pour pouvoir endosser des rôles de ces tailles là et j’ai aujourd’hui la chance qu’on m’en propose de très beaux !

Preuve que le travail sert toujours !

Ce n’est pas à moi qu’il faut dire ça ! (rires) Je ne fais que travailler, travailler et travailler encore même si finalement, je n’ai pas l’impression de travailler du tout puisque j’ai la chance de faire le métier dont j’ai toujours rêvé. C’est un immense bonheur car chaque matin, je me réveille en me disant que j’ai de la chance alors j’en profite au maximum car je ne sais pas si demain ça continuera ainsi…

Les comédies musicales ne sont qu’un héritage de l’opérette donc ce n’est pas si étonnant de te retrouver en tournée avec un album intitulé Luis…

Tout à fait, l’opérette est l’ancêtre de la comédie musicale et l’album Luis était pour moi une façon de tirer un coup de chapeau à tout ce milieu et en particulier à Luis Mariano qui est vraiment devenu un artiste incontournable. Ce projet n’était pas gagné au départ car beaucoup de gens me disaient que j’étais fou de faire ça, que je ne devais pas m’attaquer à un registre un peu démodé, poussiéreux et encore moins à un chanteur faisant partie des artistes un peu maudits comme Bécaud. Ils ont eu des carrières incroyables mais ils n’ont pas été suffisamment mis à l’honneur après leurs décès. J’ai donc essayé, à ma façon, de rendre hommage à Mariano.

Tu avais une attirance particulière pour lui et son répertoire ou, comme tout le monde, tu connaissais La Belle de Cadix, Besame Mucho et O Sole Mio ?

C’est un peu un mélange des deux. Mes grands-mères écoutaient beaucoup Luis Mariano et je crois qu’il en est resté quelque chose dans mon inconscient dont les incontournables Mexico ou La Belle de Cadix. Mais ce n’est que quand je me suis vraiment penché sur ce projet que je me suis aperçu qu’il avait un des plus grands répertoires de la chanson française. On le retrouve de O Sole Mio à Besame Mucho qui sont très connus mais aussi dans Cavaliers qui sera d’ailleurs mon prochain single. C’est une chanson qui n’est pas du tout connue mais qui est pourtant très jolie et qui avait remporté un grand succès en son temps. Je l’aime beaucoup. Le choix des titres de l’album a été très difficile vu le nombre de chansons que compte son répertoire mais j’ai fini par choisir celles qui, tout simplement, me plaisaient le plus. Et puis, quand je fais une reprise, j’aime bien y apporter quelque chose de nouveau, de personnel et avec Cavaliers, ça a très bien fonctionné. Si je ne trouve pas le petit plus qui fera une différence avec une version originale, je préfère ne pas m’y attaquer.

En regardant ton parcours et celui de Luis Mariano, on note des similitudes dans les singularités. Il a eu une carrière importante à lavincent-niclo-interview-le-mensuel-2014-D télévision et toi, ténor, on t’a vu dans des comédies musicales et des séries télévisées. Ce n’est pas un parcours habituel pour une voix comme la tienne…

C’est vrai que je n’ai pas eu un parcours très classique mais quelque part, j’en suis fier, parce qu’au fond de moi, je sais que c’est ce qui m’a construit et qui a fait ce que je suis aujourd’hui. C’est ce parcours si singulier qui me permet d’aller d’un exercice à un autre et c’est vrai qu’il y a pas mal de choses qui nous rapprochent Luis Mariano et moi… Il a pas mal galéré, il a chanté dans des restaurants et le succès n’a pas été immédiatement foudroyant pour lui non plus, c’est allé crescendo. Et puis il faisait ce métier par amour, par passion et c’est ce qui m’a toujours animé moi aussi. C’est d’ailleurs à cause de ça qu’il m’est arrivé de ne pas toujours faire les bons choix, stratégiquement parlant ! (rires) J’ai fait des projets parce que j’y croyais, parce que je les aimais mais pas parce que je recherchais un succès grand public… Mariano avait une certaine liberté et c’est ce que j’essaie de défendre aussi au quotidien. Je n’ai pas envie de rentrer dans une case et lorsqu’on me dit que je suis seul à faire quelque chose, plutôt que de m’effrayer, ça me fait très plaisir. Je n’essaye pas de ressembler à quelqu’un d’autre. Ça me permet de faire des choix cohérents avec ce que je suis, c’est comme ça, je cois, qu’on ne se perd pas et que l’on peut continuer à pouvoir se regarder dans la glace en étant certain de ne pas s’être trahi.

Dans l’album Luis, on trouve un duo avec Monsieur Aznavour sur Esperanza… Une sublime récompense inattendue ?

Oui, inattendue, c’est exactement ça ! (rires) Il refuse toutes les propositions… C’est lui qui avait écrit les paroles en français de la chanson Esperanza et on s’est dit « pourquoi ne pas jeter une bouteille à la mer en lui demandant d’accepter un duo ? ». J’avais peu d’espoir mais un jour, j’ai reçu un coup de fil et j’ai été dans l’incapacité de parler pendant au moins vingt minutes ! (rires) Il m’a dit qu’il avait écouté mon travail, qu’il adorait ce que je faisais et qu’il avait envie de faire ce duo avec moi ! C’était vraiment un moment incroyable pour moi, je m’en souviendrai toute ma vie !

Tu attires dans les salles un public plus jeune et différent de celui qui s’intéresse au classique ou à Luis Mariano… Ça permet de dépoussiérer les genres ?

Oui je le crois même si je n’ai pas cette prétention de dépoussiérer le classique ou l’Opéra… En tous cas, force est de constater que j’ai un public qui va vraiment de 7 à 77 ans comme on dit ! (rires) Je le verrai bien pendant ma tournée Premier rendez-vous mais je crois qu’une grande partie du public est comme moi et a une culture musicale très vaste, c’est rare que quelqu’un n’aime qu’un style de musique. Ma mère, enceinte de moi, allait à l’Opéra, ma grand-mère en chantait, mon père était plus variétés, pop et moi, je suis passionné d’électro ! J’ai mélangé toutes ces influences durant toute ma vie et je m’éclate aujourd’hui ! Jusqu’à maintenant, je n’ai fait que des reprises, mais dans le prochain album (et je suis en plein dedans !) il n’y aura que des inédits pour lesquels j’ai fait appel à beaucoup de compositeurs et d’auteurs. C’est formidable car ça me permettra de m’exprimer encore plus en faisant en même temps une musique que j’aimerais écouter à la radio, une musique qui me plait.

Sur scène, à quoi s’attendre ?

Je vais essayer d’être à la hauteur de ce que les gens attendront de moi et du bonheur qu’ils vont m’offrir. J’ai envie de leur procurer de l’émotion, de la joie mais aussi des sensations fortes en essayant de les emmener dans mon univers. Ce sera un mélange d’Opéra Rouge, de Luis et de chansons qui ont marquées ma carrière. Et il y aura aussi des titres de mon premier album et un premier extrait de mon prochain album en exclusivité ! Ce sera rempli de surprises !

L’album Luis s’achève sur C’est magnifique pour rappeller que la vie peut l’être ?

Oui, c’est un petit clin d’oeil parce que je ne réalise toujours pas ce qu’il m’arrive ! J’ai tellement rêvé, pas d’être célèbre, mais de faire ce métier et de pouvoir travailler avec les meilleurs, rencontrer des gens qui m’ont fait rêver… C’est ce qui est en train de m’arriver donc c’est formidable de pouvoir chanter dans toute la France comme ça même si je ne réalise toujours pas vraiment ! (rires) C’est peut-être mieux comme ça, ainsi je ne change pas. Je suis conscient du chemin parcouru mais aussi de celui qu’il reste à faire…



Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson pour Le Mensuel
Interview parue dans l’édition n°348 de Mai 2014


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