INTERVIEW

Patrick Bosso en interview

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Connu pour avoir la « tchatche » en toute circonstance, c’est étrangement dans le rôle d’un prisonnier muet que Patrick Bosso s’est attiré toutes les louanges du public et des professionnels du théâtre ces derniers mois… Ne pouvant s’exprimer qu’à travers sa posture, sa gestuelle, ses mimiques et son regard dans la pièce Acting, l’humoriste a prouvé à ceux qui ne l’imaginaient pas dans un autre registre que celui du « rigolo » marseillais de service, qu’il était avant tout un véritable comédien… Seul, en parallèle, pour jouer son spectacle Sans accent, c’est de lui, tel qu’il est aujourd’hui, qu’il a choisi de nous parler avec autant de lucidité que d’autodérision et d’autocritique.

 

Patrick Bosso dans la pièce « Acting » à Marseille le 14 mars dans son nouveau spectacle « Sans accent » à Toulon le 06 avril


« Sans accent, je ne serais peut-être pas tout à fait moi… »


Morgane Las Dit Peisson : Comment se sent-on quand on s’apprête à monter seul sur scène ?

Patrick Bosso : Cet instant qui précède le début du spectacle est toujours un peu étrange… On est à la fois très impatient et angoissé ! C’est un peu le moment le plus redouté, j’ai l’impression, par tous les humoristes… Ça ressemble pas mal à l’ambiance d’une salle d’attente sauf que, contrairement à ce que l’on ressent en tant que patients, on a hâte d’y être ! (rires)

Sans accent est un nouveau spectacle…

J’ai joué sur mon accent marseillais pour ce titre même si je n’ai pas réellement l’intention de le jouer « sans accent » ! C’est plus une mise à nu, c’est me présenter comme je suis sans artifice, sans filtre et c’est aussi une occasion de rappeler que je ne suis pas qu’un mec avec un accent ! (rires) Dans ce nouveau spectacle, j’ai fait le choix de parler de mon parcours pour répondre à une question qu’un gamin m’avait posé : « Comment fait-on pour faire « connu » comme métier ? »… C’était à la fois mignon et inquiétant car c’est un triste reflet de notre société. Avec les réseaux sociaux, tout le monde cherche à à être vu et un peu reconnu sans véritable autre finalité alors ça m’a donné l’idée de mettre, justement, un peu l’accent sur la valeur du travail tout en parlant, évidemment, de plein d’autres choses. 

On vous présente souvent comme un « humoriste marseillais »…

Exactement ! (rires) J’ai souvent la chance d’être invité sur des plateaux télé ou dans des émissions de radio et, presque à chaque fois, on m’annonce comme « l’humoriste marseillais » comme si j’étais un représentant de la ville ! (rires) Ce n’est pas extrêmement gênant mais c’est vrai que je n’ai pas envie de n’être réduit qu’à cette particularité, si tant est que ç’en soit une ! On ne dit pas « l’humoriste blond », « l’humoriste noir » ou « l’humoriste handicapé » alors qu’on le fait facilement pour les marseillais et les belges, ça n’a rien de grave mais c’est curieux !

Vous n’avez jamais été tenté de l’atténuer voire l’effacer ?

Je crois que j’ai seulement réalisé que j’avais un accent lorsque je suis arrivé sur Paris… Dans mon « environnement naturel », je parlais comme tout le monde ! (rires) Cet accent fait partie de moi, de mon histoire, de ma personnalité et c’est aussi ça que souligne le choix de ce titre car, sans accent, je ne serais peut-être pas tout à fait moi. C’est quelque chose que j’ai défendu depuis mes débuts même si, bien sûr, le renier m’aurait sûrement permis d’accéder à plus de rôles en tant que comédien… On ne voit jamais dans un film des personnages « sérieux » comme des avocats, chirurgiens ou hommes politiques avec un accent marseillais, c’est réservé aux rôles de poissonniers ou de joueurs de pétanque… 

On vous retrouve en one man mais aussi au théâtre dans Acting

En compagnie de Kad Merad mais surtout de Niels Arestrup qui a été mon tout premier professeur de théâtre quand je suis arrivé sur Paris ! C’est d’ailleurs lui qui m’avait conseillé de conserver mon accent à l’époque… Alors me retrouver à jouer avec lui sur scène c’est très émouvant pour moi, c’est un joli cadeau que la vie m’a offert !

Un personnage muet…

En tous cas un personnage qui ne parle pas… Sur le papier ça pourrait paraître reposant mais c’est beaucoup plus compliqué que ça n’y paraît ! Toutes ses émotions et ses réflexions ne passent que par sa gestuelle, ses mimiques et son regard, c’est très intense à interpréter. C’est un mec qui est en prison depuis très longtemps et qui semble assez imprévisible… Je me suis raconté qu’il était dans sa cellule depuis si longtemps que même si on lui proposait d’en sortir, il ne le voudrait pas. C’est un personnage tellement à l’opposé de ce que je propose d’habitude et de ce que je suis personnellement que c’est d’une richesse incroyable à jouer…

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson • Photos William Let


Interview parue dans les éditions #1 et #2 du mois de mars 2018

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