https://www.youtube.com/watch?v=C7mTIv2eG5E

INTERVIEW

Lorànt Deutsch en interview

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Co-produit par Daniel Benoin chez qui il s’est façonné début octobre, Romanesquele premier seul en scène de Lorànt Deutsch – se propose, avec finesse, humour et panache, de nous faire voyager dans le temps pour suivre en accéléré ce qui a façonné l’identité du citoyen français de souche, d’adoption ou de coeur : sa langue. Preuve vivante de la richesse et de la mixité de ceux qui l’ont parlée et faite évoluer au fil des siècles, le comédien rappelle combien notre langue française nous définit, nous ressemble et surtout nous rassemble…

LORÀNT DEUTSCH dans Romanesque, La folle aventure de la langue française 

Aix en Provence / 05 > 07 décembre


« Pour la première fois, je suis seul… »


MORGANE LAS DIT PEISSON : Un seul en scène sur notre langue française…

LORÀNT DEUTSCH : Ce spectacle – Romanesque – est l’adaptation de mon dernier livre où je raconte, dans une espèce de quête latine et romanesque, la grande aventure, le parcours, la circonvolution, les péripéties inavouables, amusantes et croustillantes (rires) qui ont façonné et forgé notre identité à travers ce qui est le plus représentatif du français d’aujourd’hui, sa langue ! 

Un travail de réécriture…

C’est une adaptation sans l’être en effet car ce que j’ai écrit dans le livre est plus détaillé, argumenté, nourri et investi que ce que je destinais à la scène… J’avais gardé pour elle tout ce qui était plus léger, primesautier, truculent, facile à incarner mais aussi plus surprenant. Le sujet reste le même mais le traitement est quant à lui très différent. Il y a eu un énorme travail de transformation !

C’est Une première fois…

Oui et je m’aperçois que destiner un texte à la scène est une mécanique très complexe ! C’est une espèce d’expérimentation permanente dans laquelle le public joue un rôle  primordial ! D’ailleurs, grâce à ses retours, le spectacle a déjà beaucoup bougé en une poignée de représentations… Rester plusieurs jours en résidence comme j’ai pu le faire au Théâtre Anthéa tient du laboratoire, c’est une étape intense mais passionnante !

Être seul en scène…

Je viens du sport collectif, j’ai joué au football et le théâtre est pour moi l’occasion d’être en équipe avec des copains sur scène, dans les coulisses, dans les loges, au restaurant, en tournée, dans le bus… J’adore cet esprit de troupe ! Là, pour la première fois, je suis seul… Honnêtement, c’est un peu moins agréable dès que je ressors de scène mais quand j’y suis, mon partenaire c’est le public ! Je m’adresse à lui directement, j’ai encore plus besoin de lui que jamais, ça fait voler en éclat le quatrième mur auquel j’ai toujours été habitué mais je dois reconnaître que c’est une incroyable récompense ! 

Ton intérêt pour l’évolution de la langue…

Ce qui m’a le plus captivé, c’est que la langue française s’est toujours refusée à être fixée, cadenassée, enfermée. D’abord elle est née de l’oral et du mouvement… Elle est pleine de particularités, d’accents, de variations, elle est ondoyante. Elle n’est ni éternelle ni immuable, sinon aujourd’hui on parlerait encore le latin ! (rires) Elle est toujours en avance sur son temps, sur les maîtres, sur les censeurs, elle saute par-dessus les lois, c’est ce qui me plait et me rassure par rapport au français d’aujourd’hui ! Certains estiment qu’il s’appauvrit mais c’est ce qu’on a pensé à chaque évolution… En ce moment, on est dans un temps fort de compression, de contraction et on retrouvera certainement plus tard un temps de détente, de distorsion, un temps un peu plus alangui, plus enrichi, plus étendu… C’est cyclique ! 

Qui dit contraction, dit rapidité, dit À toute berzingue

(rires) Aujourd’hui, ce qui caractérise les réseaux sociaux, c’est la vitesse, l’immédiateté, la frénésie ! Je me suis dit que puisque j’avais une tendance à parler vite, j’allais exploiter ce « courant » en racontant l’histoire d’une ville à fond la caisse, en courant, au galop ! Dans À toute berzingue, je « visite » des villes en cinq minutes et cinq temps forts. Antibes par exemple sera vue sous l’Antiquité, le Moyen Âge, la Renaissance, l’Epoque Moderne et l’époque actuelle.

Difficile de condenser l’Histoire…

Ça demande un travail de synthèse, on brosse les choses à grands traits mais j’essaye toujours de trouver des petites anecdotes pittoresques comme le fait que le Cap d’Antibes était une plaine rocailleuse abandonnée par les Italiens parce qu’ils trouvaient que c’était trop loin du centre ville d’Antibes alors qu’aujourd’hui, tout le monde voudrait avoir les moyens de vivre à côté de l’Eden-Roc ! (rires)

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson au Théâtre Anthéa d’Antibes • Photos E. Sokol


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Interview parue dans les éditions n°408 #1, #2, #3 et #4 de novembre 2019

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