INTERVIEW

Armelle en interview

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Atypique, Armelle s’est faite remarquée du grand public dès le début des années 2000 dans « Caméra Café » d’une part, mais aussi dans des réclames comme Spontex ou Le Gaulois qui lui ont valu pour l’une de recevoir un prix de comédienne et pour l’autre de laisser dans les mémoires une réplique désormais célèbre : « Chéri, c’est quoi une poëëëële ? »… Certes, sa voix, comme celle de Chantal Ladesou – avec qui elle a partagé la scène dans « Nelson » et avec qui elle siège aux Grosses Têtes -, est reconnaissable entre mille mais sa carrière ne se résume heureusement pas qu’à cette particularité… Passionnée, curieuse et investie, Armelle, en véritable éponge, est aussi capable de camper une vegan fantasque que de redonner vie à l’une des plus grandes cantatrices de notre temps !

 

 

ARMELLE, « QUELLE FAMILLE ! »

Sanary-sur-Mer/ 25 octobre (REPORT COVID-19 du 07 avril 2020)

Salon de Provence / 05 mai

au cinéma dans « LA BONNE ÉPOUSE » le 11 mars

 


« Me glisser dans d’autres peaux me repose de moi-même ! »


MORGANE LAS DIT PEISSON : Le théâtre, un travail de mémoire et de troupe…

ARMELLE : Le théâtre, c’est vraiment un travail d’équipe car on dépend tous les uns des autres, d’ailleurs, on a tous les répliques de nos partenaires dans la tête ! C’est un exercice très organique, très physique de jouer sur scène… Ça occupe l’oreille, le corps, la vue, la bouche… Un geste appelle un mot qui lui-même appelle un son… C’est une mémoire extrêmement complexe et complète qui s’insinue même dans le « formant » de la bouche ! (rires) Il m’est arrivé d’avoir un trou et de retrouver mon texte uniquement parce que ma bouche, elle, se souvenait de la position qu’elle devait prendre à se moment là et le bon son en est sorti ! Cette fois-là, j’avoue que ça m’a vraiment impressionnée ! (rires)

Une horlogerie très précise…

C’est tout à fait le mot, c’est une horlogerie extrêmement technique qui n’a l’air de rien mais qui est d’une infinie précision et qui exige également d’être en mesure d’improviser à chaque instant puisque tout peut arriver sur scène et surtout, on ne peut jamais prédire les réactions des gens ou le temps d’un rire… C’est d’ailleurs grâce à ça qu’on ne s’ennuie jamais même si on répète chaque soir les mêmes mots !

Quelle famille ! a du succès…

Depuis septembre 2018, on l’a jouée 5 mois en tout à Bordeaux, fait les festivals d’été et on est, en 2020, sur une seconde tournée ! C’est en effet un très beau succès ! On désirait de toutes nos forces que la pièce fonctionne mais on ne s’était pas imaginé que ça puisse être à ce point ! 

Il vaut mieux aimer la pièce quand elle dure si longtemps…

C’est préférable en effet ! (rires) J’ai tout de suite adoré, dans Quelle famille !, son côté justement familial qui présente quatre générations… C’est très rare au théâtre d’avoir sur une même scène les petits-enfants, les parents, les grands-parents et les arrières-grands-parents mais c’est très appréciable tant en termes d’amplitude de jeu que de richesse humaine ! Et puis, il y a aussi ce côté Au théâtre ce soir qui nous enchantait quand on était plus jeunes et que l’on retrouve dans les décors très années 70 de Nicolas Delas…

Un classique du théâtre de boulevard…

Le plus délicat avec une pièce comme Quelle famille ! c’est de la recréer, ne surtout pas copier ce qui avait été fait avec Patrick Préjean et Micheline Dax tout en ne dénaturant pas l’esprit originel et les codes propres au boulevard… Il y avait un équilibre à trouver entre la restitution, l’hommage et le temps écoulé.

Un retour à la comédie après Une heure avec Maria Callas

Ça me touche que vous me parliez de ce spectacle Une heure avec Maria Callas… On a eu envie de le créer pour rendre hommage à la Callas à l’occasion des quarante ans de sa disparition et Nicolas Delas a eu la brillantissime idée de mettre en scène un montage des interviews en français qu’elle a données durant sa carrière. Je lisais ses propos dans des magazines d’époque reconstitués et en voix off, Xavier Viton campait le journaliste… Ça m’a posé de nombreuses interrogations au moment de la création ; devais-je être moi, un personnage à créer ou incarner Maria Callas ? À force de l’écouter et d’apprendre ses réponses, j’ai fini par opter pour la troisième solution mais pour moi qui ai une diction assez reconnaissable (rires), ça a demandé un gros travail d’écoute ! Il a fallu que je réussisse à capter ce timbre si particulier et que je m’approprie cette façon si merveilleuse qu’elle avait de parler ! Artistiquement, me plonger dans ce projet et cet univers a été une expérience extraordinaire… Ça m’a apporté une immense joie bien qu’au début, j’étais pétrie de craintes quant au rendu… Moi « callassisée » ça pouvait, sur le papier, autant virer au Muppet Show qu’à l’imitation… On l’a fait avec très peu de moyens donc c’était compliqué d’imaginer la forme finale mais dès le premier soir sur scène, ça a été magique !

C’est un petit bijou que je garde précieusement dans ma gibecière et que j’espère bien pouvoir rejouer dès que l’occasion se représentera !

Un rôle comme celui-ci enrichit le jeu d’un acteur…

J’ai compris en le jouant que je n’étais rien d’autre qu’un canal et qu’à travers ma chair, c’est la Callas qui s’invitait, c’est elle que les ondes de ma voix restituaient… Un rôle comme ça rend très humble ! (rires) C’était un autre travail, une autre sensibilité, une porte ouverte sur une partie de mon jardin secret, sur mon amour pour les voix et l’art lyrique mais surtout, ça m’a prouvé de quoi j’étais capable en tant que comédienne et ce n’est pas impossible que ça ait un impact sur les projets à venir…

D’où vous vient ce besoin de vous glisser dans d’autres peaux ?

La première raison, je crois, c’est vraiment la dimension enfantine qu’offre le jeu mais la seconde, qui n’est pas à prendre à la légère, c’est que ça me repose de moi-même ! (rires)

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson aux Nuits Auréliennes de Fréjus 2019 • Photos Léa Lejeune


Interview parue dans les éditions n°412 #1, #2, #3 et #4 du mois de mars 2020

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