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INTERVIEW

Laura Laune en interview

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Tous ceux qui la suivent depuis ses débuts ne s’étonnent certainement pas du succès qu’elle connaît aujourd’hui bien qu’ils n’avaient sûrement pas imaginé que celui-ci lui tomberait dessus après un tour de chant… Car si des fées se sont indubitablement penchées sur son berceau, celles-ci n’avaient semble-t-il pas prévu d’en faire la digne héritière de Maria Callas ou Céline Dion… Et pourtant, c’est bien avec une guitare et un micro à la main que Laura Laune – telle Hélène (et les garçons bien sûr) -, a eu l’audace de se présenter mais surtout de remporter la finale de l’émission La France a un incroyable talent ! Moins musical certes – à l’exception de la chanson de Léa la girafe – son spectacle Le diable est une gentille petite fille, est, pour tous ceux qui ne connaissent pas encore très bien l’univers scénique de l’humoriste, fidèle au ton qu’elle a dévoilé en télé. Drôle, noir et trash, son humour – qu’elle travaille sans relâche aux côtés de Jérémy Ferrari – bouscule, interpelle et fait réfléchir sans jamais – grâce certainement à la douceur de ses traits, son évidente bienveillance mais aussi à la qualité d’une interprétation qui n’a fait que se bonifier avec le temps -, choquer ni braquer ses spectateurs.

 

 


« NE JAMAIS CÉDER ET CONTINUER À Y CROIRE… »


MORGANE LAS DIT PEISSON : NOMBREUSES DE TES DATES AFFICHENT COMPLET DES MOIS À L’AVANCE…

LAURA LAUNE : C’est littéralement génial et quand je prends conscience de ça, je passe mon temps à croiser les doigts pour que ça dure le plus longtemps possible ! (rires) C’est un métier très difficile quand on commence… Les salles peinent à se remplir, il y a beaucoup de « concurrence » et, comme ça a été mon cas, on te dit parfois ouvertement que tu ne réussiras jamais… J’entendais perpétuellement que le public n’allait pas adhérer à mon type d’humour et que je n’allais avoir aucun média à mes côtés alors réaliser qu’une tournée de 134 dates – parfois déjà complètes un an avant – se profile, ça rassure autant que ça paraît complètement dingue ! (rires)

ÇA VALAIT LE COUP DE PERSÉVÉRER QUAND ON VOIT LES GENS SE DÉPLACER…

Chaque soir, quand je monte sur scène, c’est quelque chose dont je prends conscience… Pendant une période, j’ai joué tous les soirs sur Paris et, à chaque coup de fatigue ou sensation de routine, je me suis motivée en pensant au public. Sans lui et sans son soutien, je n’en serais pas là alors la moindre des choses, c’est de tout lui donner à chaque représentation ! Et puis, c’est inexplicable mais quand je le sens dans la salle, je me nourris de son énergie et ça me recharge instantanément ! (rires)

TON SUCCÈS PROUVE QUE L’HUMOUR NOIR RÉPOND À UNE ATTENTE DU PUBLIC..

Le public apprécie cet humour, comprend que c’est du second degré, rit et se prend moins la tête que certains professionnels qui, bien qu’ils aiment ce spectacle, n’osent pas le programmer pensant que les gens ne comprendront pas leur choix… Même si c’est inconscient, c’est insultant vis à vis du public qui n’est pas une masse idiote ! Il sait ce qu’il veut et c’est toujours lui qui a le dernier mot !

S’IMPOSER EST COMPLIQUÉ LES PREMIERS TEMPS…

Plusieurs fois, j’ai dû renoncer à des émissions de télé ou de radio parce qu’on me demandait d’adoucir mes propos… C’est un des pires moments à vivre quand on n’est pas encore très connu et que l’on cherche à toucher un maximum de gens… Dire non est un crève-coeur mais c’est une étape essentielle quand on défend un projet et que l’on veut garder son identité.

M6 A ÉTÉ LA PREUVE QUE TU AS BIEN FAIT DE NE PAS TE FOURVOYER…

Ils savaient que je n’accepterais pas de me censurer et ça a fonctionné donc en effet ça prouve que l’on peut être un média populaire et cautionner l’humour noir ! Gagner La France a un incroyable talent m’a évidemment fait un immense plaisir mais ça m’a surtout confirmé que j’avais eu raison de ne jamais céder et de continuer à y croire ! Ça a fini par payer mais heureusement que j’ai une production qui me soutient dans mes choix grâce, entre autres, au parcours de Jérémy Ferrari qui a connu les mêmes dilemmes avant moi… Je ne regrette pas un instant de lui avoir fait confiance !

MALGRÉ UN VISAGE ANGÉ- LIQUE TU AS RÉUSSI À PASSER MAÎTRE DANS TON REGISTRE…

(rires) J’ai des airs de ne pas y toucher et c’est justement sur ça que j’ai eu envie de jouer ! Jeune, on m’a toujours appelée « la petite », j’étais timide, solitaire, on me croyait un peu naïve et c’est de cette ambivalence que je me suis appuyée pour monter sur scène. J’ai l’impression que l’association de mon physique et de mon humour ajoute à ce dernier un effet de surprise… Je ne sais pas si cette combinaison me permet d’aller plus loin mais beaucoup de gens me disent que certains de mes propos auraient l’air beaucoup plus durs, plus vulgaires et plus frontaux dans la bouche d’un homme…

UN HUMOUR TRASH MAIS PAS GRATUIT…

C’est vraiment ce que j’essaye de faire en abordant ce qui me semble injuste… Choquer juste pour faire rire n’aurait pas d’intérêt si ça ne servait pas à dénoncer le racisme, l’homophobie ou la pédophilie…

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson aux Plages du Rire • Photos J. Caught • Maquillage C. Chenoz


Interview parue dans les éditions n°395 #1, #2 et #3 du mois de septembre 2018

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